La Fabrique du crétin digital

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Michel DESMURGET, La Fabrique du crétin digital : Les dangers des écrans pour nos enfants, Paris, Seuil, « Sciences humaines », 29/08/2019, 426 p., 20,00 €.

Couverture du livre La Fabrique du crétin digitale

Dans son ouvrage de vulgarisation, La Fabrique du crétin digital, le neuroscientifique Michel Desmurget livre une critique forte de l’impact des écrans numériques sur le développement cognitif, émotionnel et social des enfants. Alors que les appareils numériques s’intègrent de plus en plus dans la vie quotidienne, le livre – qui a fait l’objet de recherches approfondies – arrive à point nommé pour inciter les parents, les éducateurs et les décideurs politiques à reconsidérer l’utilisation omniprésente des écrans chez les jeunes générations.

L’ouvrage est structuré autour de deux grandes parties : « Homo mediaticus : La construction d’un mythe » et « Homo numericus : La réalité d’une intelligence entravée et d’une santé menacée ». Celles-ci sont encadrées d’un prologue et d’un épilogue, ainsi que d’une bibliographie de 80 pages…

La première partie, « Homo mediaticus : La construction d’un mythe » s’intéresse aux enfants issus de nos dérives : « l’incarnation médiatique de nos progénitures » (p. 35) pour montrer que cette incarnation est trompeuse. […] Le chapitre 1 « Contes et légendes » nous parle des fables des industries numériques pour nous faire croite à un changement d’anthropologie ; il décrit des errances relatives à ces discours folkloriques, quasi légendaires. […] Le chapitre 2 « Paroles d’experts » s’attaque aux «  » experts  » maison  » » – l’apprenti éthicien que je suis en est-il un ? – et aux journalistes qui rrelaient leurs discours. L’auteur décrit des errances relatives aux biais d’expertise. Le chapitre 3 « Etudes boiteuses » en remet une couche sur les journalistes et leurs choix éditoriaux en décrivant des errances relatives aux études boiteuses. Cette première partie nous invite donc à redoubler d’esprit critique à l’égard de ce qui nous est dit des écrans. Elle alerte le lecteur : l’homo mediaticus prépare le mythe de l’homo numericus.

Le mythe ayant été déconstruit, la seconde partie, « Homo numericus : La réalité d’une intelligence entravée et d’une santé menacée » s’intéresse à la réalité des enfants d’aujourd’hui et de leur développement. Le chapitre 4 « Des usages abusifs (trop) répandus » explore les usages des écrans par les enfants et adolescents : quels écrans sont utilisés et à quelles fins ? combien de temps est ‘volé’ à d’autres activités et à partir de combien de temps – selon l’âge – l’usage des écrans récréatifs affecte-t-il négativement le développement ? Qui est affecté – en fonction du sexe, du milieu socio-économique… – ? Ce chapitre 4 propose également des recommandations très pertinentes. Le chapitre 5 « Réussite scolaire : attention, danger ! » distingue les usages domestiques et scolaires des écrans pour se demander comment cette consommation influence la réussite scolaire. A en croire l’auteur, l’influence est systématiquement négatif, y compris à l’école où il semble que les nombreux pédagogues qui usent du numérique s’illusionne sur ses aspects positifs et ne se rende pas compte qu’ils sont manipulés par un complexe techno-économique… Le chapitre 6 « Développement : l’intelligence, première victime » étudie comment cette consommation influence le développement intellectuel de l’enfant et conclue que les écrans sapent les inercations humaines, le langage, et la concentration. Le chapitre 7 « Santé : une agression silencieuse » s’ouvre ainsi : « La communauté scientifique affirme depuis des années que  » les médias [électroniques] doivent être reconnus comme un problème majeur de santé publique. » » (p. 295) ; dès l’introduction, l’intuition nous permettra de saisir que l’auteur déduira que la consommation d’écrans influence négativement la santé… Michel Desmurget conclut d’ailleurs que l’impact est très négatif sur le sommeil, le degré de sédentarité, et les contenus dits  » à risques « .

Michel Desmurget souligne ainsi l’ampleur du problème, en présentant des statistiques et des tendances alarmantes concernant le temps passé devant un écran par les enfants. Il analyse en détail les effets d’une exposition excessive aux écrans sur les fonctions cognitives, la santé mentale, les résultats scolaires et les aptitudes sociales. Chaque chapitre est étayé par une multitude d’études scientifiques, de données empiriques et de témoignages d’experts, ce qui permet d’étayer solidement les arguments de l’auteur. La rigueur méthodologique est remarquable ! L’ouvrage est très complet. L’écriture est claire et captivante, ce qui est une gageure avec tant de référence. L’auteur propose des recommandations pratiques qui me semblent bienvenues et pertinentes. Néanmoins, la position ferme, voire intransigeante, de Michel Desmurget contre l’utilisation des écrans me semble manquer de nuances. Bien utiliser, les « écrans » – c’est une métonymie – ont aussi des vertus ; des études scientifiques le démontrent également. L’auteur le concède parfois mais trop rarement me semble-t-il car il consacre l’essentiel de son ouvrage à mettre fortement l’accent sur les aspects négatifs. Il me semble que cela conduit à une perspective déséquilibrée et un ton trop alarmiste.

Toutefois, La Fabrique du crétin digital est une critique puissante et nécessaire de l’impact des écrans numériques sur le développement des enfants. L’approche factuelle de Michel Desmurget, la clarté de son écriture et ses recommandations pratiques en font une lecture essentielle pour quiconque se préoccupe de l’avenir des prochaines générations. L’exploration approfondie du sujet et les conseils détaillés du livre offrent des perspectives précieuses pour promouvoir des habitudes plus saines en matière d’écrans et protéger le bien-être cognitif et émotionnel des enfants.

Ouvrage : https://www.seuil.com/ouvrage/la-fabrique-du-cretin-digital-michel-desmurget/9782021423310

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