En 718, Sainte Attale fondait à Strasbourg l’abbaye Saint-Etienne qui devint en 1861 le Collège épiscopal Saint Etienne où j’ai le privilège d’enseigner au service du Seigneur et de nos élèves. Cet anniversaire peu banal, notre établissement catholique va le célébrer toute l’année. Il est l’occasion de quelques réflexions sur l’histoire et l’identité.
L’artiste Tam Too et son complice Laurent Maltese ont réalisé une série de Draw My Life pour partager les richesses de l’histoire du Collège épiscopal Saint Etienne. Le premier d’entre eux porte sur l’histoire de cette institution :
Il y a 1300 ans, le frère de Sainte Odile (662-720), Adalbert (665-722) est duc d’Alsace depuis 28 ans quand il décide de l’érection du premier monastère de Strasbourg, sa capitale. Avec l’accord de l’évêque du lieu, il confiera cette fondation à sa fille aînée, Attale, qui avait été éduquée à l’abbaye de Hohenbourg sous l’égide de sa tante. Le monastère strasbourgeois sera établi dans l’enceinte de l’ancien camp romain d’Argentoratum sur les vestiges d’une basilique romaine du Ve siècle. Celle-ci avait été consacrée à Dieu sous le patronage de Saint Etienne, le protomartyr (premier témoin : cf. Ac 6-8) qui était très vénéré à l’époque. Ce patronage perdure encore.
Attale, brillant par sa charité, deviendra la patronne de Strasbourg dès sa mort en 741. Sa réputation est telle que la troisième abbesse de Hohenbourg -notre Mont Sainte-Odile- envoie un prêtre voler une partie de ses restes mortels, une relique : la fameuse main de Sainte Attale que nous pouvons toujours vénérer dans la chapelle du Collège épiscopal Saint Etienne.
Pourquoi se tourner ainsi vers le passé ? Notre identité ne se réduit-elle pas à notre histoire personnelle ?
Si nous sommes seuls, certainement notre histoire est réduite… tout au plus à quelques décennies. Mais si nous nous reconnaissons comme membre de communautés, alors notre histoire est davantage : elle peut être centenaire, millénaire. Ainsi, notre héritage, nos valeurs… sont fécondées.
L’identité est cette part qui nous rend identiques, elle est donc constituée de ces biens communs qui ne nous appartiennent pas en propre et nous aide à devenir. C’est tout l’intérêt de la notion d’identité qui s’articule si heureusement avec le concept d’ipséité, notre « identité propre ». C’est ce qui fait qu’une personne est unique et absolument distincte d’une autre. Dans son ancienne devise : « Chaque élève est une personne unique », notre établissement avait mis l’accent sur l’ipséité. Dans sa nouvelle devise : « Deviens ce que tu es » le Collège épiscopal Saint Etienne a rassemblé ipséité et identité, rappelant à chacun qu’il est aussi par la grâce d’Autrui.
Plus encore, comme le rappelle le concile Vatican II dans sa constitution dogmatique Dei Verbum : « La sainte Tradition et la Sainte Écriture constituent un unique dépôt sacré de la Parole de Dieu, confié à l’Église » (n°10). En effet, la Révélation est toute entière donnée dans la Sainte Ecriture que nous pouvons accueillir personnellement et en communauté. La Révélation est notamment explicitée par la sainte Tradition c’est-à-dire la transmission manifestée pour partie dans la vie des saints. Saint Etienne, Sainte Attale… les baptisés des siècles passés nous partagent donc un témoignage qui soutient notre vie en Christ. C’est ce qu’illustre spécialement le programme de quatrième du Référentiel pour l’enseignement religieux dans les classes de collège de nos établissements catholiques d’enseignement dans sa dimension hagiographique -la biographie des saints-.
Célébrer ces 1300 ans, c’est évoquer l’histoire et plus encore la Tradition : la transmission de cet essentiel qui donne vie. Malgré quelques vicissitudes, en ce lieu et depuis 1300 ans, une communauté chrétienne est assidue à l’enseignement des apôtres, à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. (cf. Ac 2, 42) Ces chrétiens, comparables au levain dans la pâte (cf. Mt 13, 33ss) sont témoins à leur tour de l’Evangile auprès de leurs contemporains.
Célébrer ces 1300 ans, c’est évoquer l’histoire et plus encore notre identité dans le mystère de l’Incarnation : c’est ici et maintenant qu’il nous faut vivre la Nouvelle Alliance. In fine, un établissement catholique sait qu’il existe par la grâce de Dieu.
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